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"La différence entre l'érotisme et la pornographie c'est la lumière". Bruce LaBruce
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samedi 5 décembre 2015




Feral Benga, 1906-1957. Sénégal







Photographe Lucien Wallery, 1934




François Benga, dit Féral est né à Dakar en 1906. Il vécu une enfance tiraillée entre une famille paternelle aisée, travaillant pour l'administration coloniale, et sa famille maternelle connue pour ses activités de guérisseur. Ses origines sont importantes car elles sont associées à des formes culturelles particulières qui vont nourrir ses créations. Jeune adulte il tente sa chance à Paris. Apprenant que l'on cherchait des figurants noirs au music-hall il décroche son premier contrat aux Folies-Bergère. Il figure dans la revue « La Folie du jour » qui débute en avril 1926. Dans le tableau « Tout Joséphine », il effectue une imitation comique de Joséphine Baker.




Feral Benga déguisé en Joséphine Baker, photographe Lucien Wallery





Au tableau « Fatou », dans un décor représentant une jungle, il joue du tam-tam tandis que Joséphine Baker exécutait sa célèbre danse avec la ceinture de bananes. Féral Benga suit les cours de M. Saulnier, directeur du gymnase de la rue Véron à Montmartre. A la fin des années 1920, il est engagé aux Folies-Bergère et au Casino de Paris où il rencontre un grand succès. En 1930, il est l'une des vedettes de la revue des Folies-Bergère intitulée « Un coup de folie ». La même année, Féral Benga tient le rôle de l'ange noir dans le film de Jean Cocteau Le sang d'un poète. L'année suivante, il est encore à l'affiche des Folies-Bergère dans la revue « L'Usine à folies » où il interprète notamment une danse intitulée « Le Simoun » qui remporte un vif succès et qu'il reprendra plus tard. La presse est enthousiaste.


On le qualifie de « Mercure noir », de « bel Adonis nègre », de « splendide danseur noir » ou encore de « dieu de bronze ». Suivent en 1932 des succès importants à Berlin, en Suède, en Norvège, au Danemark et au Royaume-Uni. En novembre 1933, Féral Benga est sur la scène du Théâtre des Champs-Elysées. pour un « gala de danses blanc et noir » aux côtés des danseurs Jean Fazil, Rosita Cérès et Jacqueline Elsane. Il y interprète les compositions de Jean Fazil mais présente aussi ses propres chorégraphies, solos et duos, où il témoigne d'un style sobre et précis, caractérisé par une gestuelle très souple, très tonique empruntant à la technique classique et acrobatique.






La danse du sabre, photographe Lucien Wallery





Dans La Danse du sabre, qui sera une de ses créations les plus connues, il a, selon Fernand Divoire, "des bonds magnifiques, des glissements, un équilibre qui le classent dans les très bons danseurs". Hais le critique déplore que ses danses ne fassent pas suffisamment africaines. Il lui suggère d'écouter « le rythme noir qui l'habite toujours », d'abandonner « les musiques de Bach, Debussy, de Grieg pour lesquelles il n'est pas fait ». « Qu'il danse en ramassant en lui des souvenirs ancestraux.»


En 1934, Féral Benga projette d'effectuer un voyage en Afrique de l'Ouest pour y étudier les différentes danses et constituer une troupe de danseurs africains. Il est rejoint par son ami l'anthropologue britannique Geoffrey Gorer, rencontré quelques mois plus tôt à Londres par l'intermédiaire du peintre Pavel Tchelitchew. Les deux hommes traversent alors le Sénégal, le Soudan (actuel Mali), la Côte d'Ivoire, le Dahomey (actuel Bénin) et le Nigeria. Mais à l'issue de ce périple, Féral Benga ne parvient pas à former une compagnie. Gorer tirera de ce voyage un livre intitulé Dances. Publié à l'origine en 1935, ce livre est une critique dévastatrice de la domination coloniale qui est représentée comme la destruction de la société africaine par des missionnaires chrétiens qui sapent la morale indigène.

En septembre 1935, il est à l'affiche de la revue « La Folie d'amour » des Folies-Bergère. Il y incarne notamment le cygne noir dans une adaptation de La Mort du cygne. En 1938, Féral Benga ouvre un cabaret-restaurant africain à Paris. Il sert de modèles à de nombreux artistes dont notamment, à la fin des années 1930, plusieurs peintres de la Renaissance de Harlem (James Richmond Barthé, James Amos Porter) ainsi que pour des photographes comme Carl van Vechten, George Platt Lynes, Lucien Waléry, V. Henry, ou pour Pavel Tchelitchew. Benga est devenu le symbole de l'homoérotisme exotique des années 30.
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Après la seconde guerre mondiale, Féral Benga, qui réside dans le quartier latin, fréquente les intellectuels parisiens de l'époque, notamment Jean-Paul Sartre et Albert Camus. Il sert de relais à de nombreux comédiens et danseurs d'Afrique de l'Ouest comme Fodeba Keita et Douta Seck. Il épouse une cousine paternelle dont il a un fils né en 1955. Il décède en septembre 1957 et sera enterré à Châteauroux.

(Source : Anne Décoret-Ahiha, Les danses exotiques en France: 1880 - 1940. Centre National de la Danse, 2004)





Lucien Wallery, 1863-1935. Paris














































Studio V. Henry




















James Richmond Barthe (1901-1989)






Feral Benga, 1937, bronze























Pavel Tchelitchew, Deposition (Feral Benga), 1938. Huile sur toile






Carl Van Vechten, 1937










































Eli Lotar (1905-1969) 






Feral Benga, 1930





George Platt Lynes, 1934





























































Jean Cocteau, Le sang d'un poète, 1930




















3 commentaires:

  1. C'est fou tout ce qu'on apprend grâce à vous. Un immense merci !

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  2. Merci Jeromo, cela me touche. J'ai ajouté votre blog à ma liste de blogs amis (chose que j'aurais du faire depuis longtemps). Mais dîtes-moi, pourquoi un blog en esperanto, comment l'avez-vous appris, y-a-t'il beaucoup de personnes qui le parlent?

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    1. Merci Snoopy !
      Ben... pourquoi pas ! L'espéranto est une de mes langues et la langue de couple de mes parents. Mais je l'ai vraiment appris vers 17 ans, quand j'ai compris sa valeur.
      On ne sait pas combien de locuteurs a l'espéranto, mais le succès de mon blog, bien que relatif, ainsi que son internationalité évidente, est la preuve que c'est une langue vivante, moderne, neutre et internationale. En tout cas ça me plait de la faire vivre de cette façon.
      Encore merci, Snoopy !

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