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"La différence entre l'érotisme et la pornographie c'est la lumière". Bruce LaBruce
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mercredi 23 novembre 2016




Hervé Guibert, 1955-1991. France





Thierry, 1983 




vendredi 20 février 2015




Hervé Guibert, 1955-1991. France










On connait Hervé Guibert surtout comme un écrivain et on s'est beaucoup intéressé à sa littérature décrivant ses années face au SIDA (À l'ami qui ne m'a pas sauvé la vie, Gallimard, Paris, 1990. Le Protocole compassionnel, Gallimard, Paris, 1991). Le grand public le connait surtout pour avoir été le co-scénariste avec Patrice Chéreau de L'homme blessé (César du meilleur scénario en 1984.) On connait moins le photographe. 

Son travail autour de la photographie est pourtant une part importante de son oeuvre. Tout d'abord en tant que critique, où en 1977, après la collaboration avec plusieurs magazines (Combat, Had, 20 ans, Cinéma, Les Nouvelles littéraires), il entre au service culturel du journal Le Monde où il sera critique photo et cinéma jusqu'en 1985 (ses critiques sont réunies dans un recueil La Photo inéluctablement (Gallimard, 1999)). Et puis en tant qu'artiste photographique. 

Hervé Guibert commence la photographie en 1972, à 17 ans, grâce à un appareil offert par son père. Son deuxième livre (édité en 1980) fut d'ailleurs un roman photo mettant en scène ses deux grandes tantes Suzanne et Louise, un regard porté sur la vieillesse débordant d'amour et d'humanité. 





Tantes Suzanne et Louise



Guibert photographiera presque jusqu’à la fin, au moment ou il abandonne la photo pour un rêve d'enfant, le cinéma, en réalisant son unique film «La pudeur ou l’impudeur», où il filme sa déchéance jusqu'à mars 1991. La première exposition de ces clichés eu lieu quelques mois après sa mort, le 27 décembre 1991, à la gallerie Agathe Gaillard, à Paris. Le premier recueil de ses photographies fut publié aux éditions Gallimard en 1993.


Autant que l'écrivain, le photographe Hervé Guibert est talentueux. Ses photos sont très belles, en noir en blanc, élégantes, douces, fraîches, tendres où flotte parfois une douce morbidité. Comme un prolongement de son oeuvre littéraire elles nous font pénétrer son intimité, comme une illustration de sa prose. 

Il met en scène son univers, ainsi que ses amis où amants dans un journal narcissique où se croisent des instants de la vie quotidienne et des envolées surréalistes (Le portrait de Jeanne d'Arc, Autoportrait rue du Moulin-vert, 1981). Il construit un roman photo de sa vie. Dans son univers où semble flotter des fantômes, le temps semble suspendu et une douce sécurité nous enveloppe. Même si l'on sent la mort roder (comme quand il se met en scène dans son appartement comme sous un linceul), l'espace est serein et empli d'humanité. A mon avis son oeuvre photographique, malheureusement encore peu connue, vaut autant que son oeuvre littéraire.



«Je me défendrai toujours d’être un photographe : cette attraction me fait peur, il me semble qu’elle peut vite tourner à la folie, car tout est photographiable, tout est intéressant à photographier, et d’une journée de sa vie on pourrait découper des milliers d’instants, des milliers de petites surfaces, et si l’on commence pourquoi s’arrêter?»






Autoportrait de lieu et date totalement oubliés, 1990




«Je rêve que la photographie semble un même travail manuel que la calligraphie. Je rêve que les photographes se mettent à écrire et que les écrivains prennent des photos, qu’il n’y ait plus d’intimidation des uns aux autres, que chaque activité soit l’indicible, l’innommable…».Le Mausolée des amants: journal, 1976-1991, Gallimard, Paris, 2001





Autoportrait, 1976








Musée Grévin, 1978








Sienne, 1979








Sans titre, 1979








Thierry, Palerme, 1980-1981








Autoportrait rue du Moulin-vert, 1981








Santa Caterina, 1982








Hans Georg et Thierry à Montecatini, 1983








Écriture, 1983








Thierry, 1983








Autoportrait, rue du Moulin-vert, 1986








Le film porno, 1987-1988








Santa Caterina, 1990









Eugène








Eugène








Napoléon (Musée Grévin)








Nèfertito








La tête de Jeanne d'Arc











samedi 26 avril 2014



L'Homme blessé - 1983. 



 Patrice Chéreau et Hervé Guibert. France











28 avril 1983, Patrice Chereau avant l'ouverture du 36e festival de cannes où il présente son film




L'Homme blessé est le troisième long-métrage réalisé par Patrice Chéreau après La Chair de l'orchidée (1975) , une adaptation de James Hadley Chase, et Judith Therpauve (1978). Il est alors un metteur en scène de théâtre et d'opéra reconnu. A la sortie d'une projection privée de La chair de l'orchidée, Hervé Guibert rencontre Chéreau et lui dit qu'il aimerait écrire un film avec lui. Après six ans d'écriture et treize versions, l'homme blessé, d'abord intitulé l'homme qui pleure est enfin abouti, même si le roman diffère un peu du scénario du film.






 Jean-Hugues Anglade



Le film sort en 1983, produit par Richard Berry qui y joue un petit rôle de client. Il révèle Jean-Hugues Anglade dont c'est à 27 ans le premier grand film. Lors de sa présentation en Sélection officielle au Festival de Cannes, il secoua la croisette mais n'obtint aucune récompense. Il recevra le prix du meilleur scénario aux Césars en 1984.










Henri, un adolescent solitaire et taciturne, vit dans une petite ville de province. Le jour où sa soeur doit partir, toute la famille se rend à la gare. Alors que tout le monde attend le train, le jeune homme remarque un homme plus agé que lui, qui lui offre une boisson. Les hommes se séparent. Plus tard, Henri le revoit qui descend aux toilettes et le suit.







Là, il le découvre en train de tabasser un homme qui l'avait payé pour cela. Tout en fureur, l'homme, Jean, l'oblige à frapper l'homme à terre et embrasse Henri fougueusement avant de disparaître. Pour Henri, c'est le choc. Immédiatement, il éprouve une immense passion pour cet homme qu'il décide de retrouver.














Avec l'aide de Bossman, un médecin homosexuel, il poursuivra cette quète qui le plongera dans le monde de la nuit, des chiottes publiques, de la prostitution, de la marginalité et de la déchéance. Un monde glauque où la douleur, la misère et la solitude accompagnent la découverte de l'amour chez un jeune homme, la passion qui mènera à la mort. Dans une lente descente aux enfers, l'amour à mort.















Présenté en 1983 au Festival de Cannes, L’Homme Blessé ne manqua pas de faire scandale. Les hétérosexuels comme les gays y voyaient une représentation sinistre de l’homosexualité, uniquement basée sur les rapports de force, la violence. Ce à quoi Chéreau répondit: "On ne fait pas en général de film sur les histoires heureuses. On n'a jamais reproché aux histoires hétérosexuelles malheureuses de jeter une triste lumière sur l'hétérosexualité"









Ce film à l'ambiance poisseuse, où l'on ne sait jamais si c'est le jour où la nuit, où l'on a l'impression de déambuler en plein cauchemar est un chef-d'oeuvre. Malgré la crasse des chiottes qui sentent la pisse, malgré la violence, malgré une représentation sordide d'une certaine homosexualité pré-sida, la passion est là, puissante et destructrice. Ce film est un choc.

Patrice Chéreau et Hervé Guibert ont travaillé pendant six ans sur le scénario entre 1975 et 1982. Le film a eu pour titre provisoire L'homme qui pleure. Les auteurs le voyaient comme un film "sur l'amour, sur un amour envahissant". Ils parlent d'un "coup de foudre comme initiation aux malheurs".







« Au lieu d’écrire une préface ou une postface, au lieu de dire : voilà, nous avons mis six ans à écrire cette histoire, avec de longues interruptions, bien sûr, mais en écumant, au fur et à mesure de nos deux vies, parallèlement, le meilleur de nos émotions pour en faire vivre nos deux personnages — et rêver sans contrainte à une histoire idéale — , nous avons pensé qu’il serait mieux d’y faire entrer le lecteur de plain-pied, un peu comme dans un roman, puis de lui dévoiler certaines des notes que nous avons prises l’un et l’autre, pendant ces six ans, pour lui montrer comment l’histoire s’était construite, comment nous nous étions accordés ou opposés, comment d’un récit entier il ne pouvait subsister qu’une seule réplique, et aussi comment, quand notre histoire était en panne, nous avons dû la relancer par la lecture des maîtres secrets, Dostoïevski, Genet, Borges, Pavese ou Arenas. En publiant ces notes, souvent intimes, nous ne voulons pas être des prestidigitateurs qui retournent leurs accessoires, mais plutôt laisser à la surface de la toile les quelques coups de pinceaux rugueux qui ont fait le travail. »

Quatrième de couverture de L’Homme blessé, Paris, Minuit, 1983. Hervé Guibert, Patrice Chéreau


« Patrice Chéreau m’a poussé vers des personnages, il a eu très vite besoin de noms, les a cherchés dans des nécrologies de journaux et dans le bottin. Nous nous sommes retrouvés avec ces noms, comme des enveloppes vides, qu’il fallait remplir.
Patrice Chéreau disait : « Il faut raconter une histoire. » Il avait une obsession de structure, il recommençait sans cesse des plans, avec des numérotages, traçait sur le papier des vecteurs qui correspondaient aux déplacements des personnages. Rencontre. Première disparition. Absence. Seconde rencontre. Seconde disparition. Quête.
»

Hervé Guibert, « Les Escarpins rouges », in La Piqûre d’amour et autres textes suivi de La Chair fraîche, Paris, Gallimard, 1994, pp.133-134.

Hervé Guibert, qui se destinait à une carrière de comédien, se fera connaitre comme écrivain. Il a publié son premier roman, La Mort propagande en 1977. Atteint du sida, il publiera plusieurs livre sur le sujet dont A l'ami qui ne m'a pas sauvé la vie en 1990 et le protocole compassionnel en 1991, et réalisera un documentaire La pudeur ou l'impudeur sur la maladie, la déchéance et la mort. Il se suicidera en 1992 à l'age de 36 ans.







































L'homme blessé - 1983. 


Réalisation Patrice Chéreau, scénario Patrice Chéreau et Hervé Guibert, avec Jean-Hugues Anglade (Henri), Vittorio Mezzogiorno (Jean), Roland Bertin (Bossman)...