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"La différence entre l'érotisme et la pornographie c'est la lumière". Bruce LaBruce
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samedi 26 avril 2014



L'Homme blessé - 1983. 



 Patrice Chéreau et Hervé Guibert. France











28 avril 1983, Patrice Chereau avant l'ouverture du 36e festival de cannes où il présente son film




L'Homme blessé est le troisième long-métrage réalisé par Patrice Chéreau après La Chair de l'orchidée (1975) , une adaptation de James Hadley Chase, et Judith Therpauve (1978). Il est alors un metteur en scène de théâtre et d'opéra reconnu. A la sortie d'une projection privée de La chair de l'orchidée, Hervé Guibert rencontre Chéreau et lui dit qu'il aimerait écrire un film avec lui. Après six ans d'écriture et treize versions, l'homme blessé, d'abord intitulé l'homme qui pleure est enfin abouti, même si le roman diffère un peu du scénario du film.






 Jean-Hugues Anglade



Le film sort en 1983, produit par Richard Berry qui y joue un petit rôle de client. Il révèle Jean-Hugues Anglade dont c'est à 27 ans le premier grand film. Lors de sa présentation en Sélection officielle au Festival de Cannes, il secoua la croisette mais n'obtint aucune récompense. Il recevra le prix du meilleur scénario aux Césars en 1984.










Henri, un adolescent solitaire et taciturne, vit dans une petite ville de province. Le jour où sa soeur doit partir, toute la famille se rend à la gare. Alors que tout le monde attend le train, le jeune homme remarque un homme plus agé que lui, qui lui offre une boisson. Les hommes se séparent. Plus tard, Henri le revoit qui descend aux toilettes et le suit.







Là, il le découvre en train de tabasser un homme qui l'avait payé pour cela. Tout en fureur, l'homme, Jean, l'oblige à frapper l'homme à terre et embrasse Henri fougueusement avant de disparaître. Pour Henri, c'est le choc. Immédiatement, il éprouve une immense passion pour cet homme qu'il décide de retrouver.














Avec l'aide de Bossman, un médecin homosexuel, il poursuivra cette quète qui le plongera dans le monde de la nuit, des chiottes publiques, de la prostitution, de la marginalité et de la déchéance. Un monde glauque où la douleur, la misère et la solitude accompagnent la découverte de l'amour chez un jeune homme, la passion qui mènera à la mort. Dans une lente descente aux enfers, l'amour à mort.















Présenté en 1983 au Festival de Cannes, L’Homme Blessé ne manqua pas de faire scandale. Les hétérosexuels comme les gays y voyaient une représentation sinistre de l’homosexualité, uniquement basée sur les rapports de force, la violence. Ce à quoi Chéreau répondit: "On ne fait pas en général de film sur les histoires heureuses. On n'a jamais reproché aux histoires hétérosexuelles malheureuses de jeter une triste lumière sur l'hétérosexualité"









Ce film à l'ambiance poisseuse, où l'on ne sait jamais si c'est le jour où la nuit, où l'on a l'impression de déambuler en plein cauchemar est un chef-d'oeuvre. Malgré la crasse des chiottes qui sentent la pisse, malgré la violence, malgré une représentation sordide d'une certaine homosexualité pré-sida, la passion est là, puissante et destructrice. Ce film est un choc.

Patrice Chéreau et Hervé Guibert ont travaillé pendant six ans sur le scénario entre 1975 et 1982. Le film a eu pour titre provisoire L'homme qui pleure. Les auteurs le voyaient comme un film "sur l'amour, sur un amour envahissant". Ils parlent d'un "coup de foudre comme initiation aux malheurs".







« Au lieu d’écrire une préface ou une postface, au lieu de dire : voilà, nous avons mis six ans à écrire cette histoire, avec de longues interruptions, bien sûr, mais en écumant, au fur et à mesure de nos deux vies, parallèlement, le meilleur de nos émotions pour en faire vivre nos deux personnages — et rêver sans contrainte à une histoire idéale — , nous avons pensé qu’il serait mieux d’y faire entrer le lecteur de plain-pied, un peu comme dans un roman, puis de lui dévoiler certaines des notes que nous avons prises l’un et l’autre, pendant ces six ans, pour lui montrer comment l’histoire s’était construite, comment nous nous étions accordés ou opposés, comment d’un récit entier il ne pouvait subsister qu’une seule réplique, et aussi comment, quand notre histoire était en panne, nous avons dû la relancer par la lecture des maîtres secrets, Dostoïevski, Genet, Borges, Pavese ou Arenas. En publiant ces notes, souvent intimes, nous ne voulons pas être des prestidigitateurs qui retournent leurs accessoires, mais plutôt laisser à la surface de la toile les quelques coups de pinceaux rugueux qui ont fait le travail. »

Quatrième de couverture de L’Homme blessé, Paris, Minuit, 1983. Hervé Guibert, Patrice Chéreau


« Patrice Chéreau m’a poussé vers des personnages, il a eu très vite besoin de noms, les a cherchés dans des nécrologies de journaux et dans le bottin. Nous nous sommes retrouvés avec ces noms, comme des enveloppes vides, qu’il fallait remplir.
Patrice Chéreau disait : « Il faut raconter une histoire. » Il avait une obsession de structure, il recommençait sans cesse des plans, avec des numérotages, traçait sur le papier des vecteurs qui correspondaient aux déplacements des personnages. Rencontre. Première disparition. Absence. Seconde rencontre. Seconde disparition. Quête.
»

Hervé Guibert, « Les Escarpins rouges », in La Piqûre d’amour et autres textes suivi de La Chair fraîche, Paris, Gallimard, 1994, pp.133-134.

Hervé Guibert, qui se destinait à une carrière de comédien, se fera connaitre comme écrivain. Il a publié son premier roman, La Mort propagande en 1977. Atteint du sida, il publiera plusieurs livre sur le sujet dont A l'ami qui ne m'a pas sauvé la vie en 1990 et le protocole compassionnel en 1991, et réalisera un documentaire La pudeur ou l'impudeur sur la maladie, la déchéance et la mort. Il se suicidera en 1992 à l'age de 36 ans.







































L'homme blessé - 1983. 


Réalisation Patrice Chéreau, scénario Patrice Chéreau et Hervé Guibert, avec Jean-Hugues Anglade (Henri), Vittorio Mezzogiorno (Jean), Roland Bertin (Bossman)...




























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