The New Gay Liberation Book, 1979.
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jeudi 10 mai 2018
vendredi 27 avril 2018
mardi 24 avril 2018
Werner Bandi, 1891-1964.Suisse
Werner Bandi
Qui était le discret photographe suisse Werner Bandi, né en 1891 à Thoune et décédé en 1964 à Spiez? Peu de choses de sa vie nous sont connues. Bien que certaines de ses prises de vue apparaissent de temps à autre dans des galeries parisiennes ou new-yorkaises, celles-ci se voient le plus souvent attribuées à « un naturiste italien »si elles ne sont pas labélisées: « photographe inconnu. »
Le père de Werner Bandi, premier garde forestier à Thoune disparaît en 1899. Werner a huit ans à l‘époque, il est cadet d‘une fratrie de trois enfants. Deux ans après le décès de son mari, la mère de Bandi, issue d‘une famille aisée, loue la pension Erica, située à Spiez au bord du lac de Thoune.
Une année plus tard, elle acquiert cet hôtel au style « chalet suisse » avec 24 chambres, fumoir, chambres de lecture et autres dépendances pour la somme respectable à l‘époque de 88‘000 francs. Spiez était une destination de vacances attrayante avec des complexes hôteliers imposants, aux noms évocateurs: Château-hôtel Schonegg, Grand Hotel Spiezerhof, Park-Hotel Bubenberg ou encore hôtel Belvédère & Beau-Rivage. Au tournant du siècle, un tram électrique relie le port de la petite ville avec la gare ferroviaire Berne-Lötschberg-Simplon, située plus haut. La station de loisirs bernoise avec un air du sud est une région très prisée, attirant des hôtes parfois illustres, dont beaucoup y passent des séjours prolongés.
L‘idylle prend fin lorsque la Seconde Guerre mondiale éclate. Avec la réquisition des palais hôteliers pour l‘armée Suisse, ceux-ci se dégradent et dans les années cinquante, la plupart des magnifiques bâtiments Belle Époque sont démolis. Ils ne correspondent plus à l‘esprit du temps avec l‘essor économique des années cinquante et ne paraissent plus assez confortables à une nouvelle clientèle, souvent motorisée.
Werner Bandi hérite de sa mère un charmant chalet, en 1951. Il travaille en qualité de commis voyageur et plus tard devient cadre de l‘entreprise de cartonnage Hoffmann, à Thoune. Son imposante Dodge Sedan à quatre portes attire l‘attention, car cette flamboyante voiture américaine n‘aurait guère pu être payé avec son salaire.
Cet homme élégant d‘un certain âge est un marginal dans la petite ville et vit très reclus. Les riverains du quartier Kornmatt n‘aperçoivent leur voisin qu‘en soirée, quand il promène son chien. En journée, c‘est la gouvernante Hulda qui effectue cette tâche.
Une ancienne voisine raconte que les enfants ont été sommés d‘éviter la maison « Bandi » en-dessus de la gare de Spiez car en fin de semaine, celle-ci était fréquentée exclusivement par une gente masculine, jeune et belle. L‘un de ces jeunes hommes est Alfred Jonathan « Bob » Steffen, le modèle préféré du photographe.
Bob Steffen par Werner Bandi, vers 1943
Bob Steffen, né en 1928 et décédé en 2012, est appelé par sa mère affectueusement « Bobes. » Comme Werner Bandi, il est le cadet d‘une fratrie de trois enfants, mais d‘origine bien plus modeste. Son père est un « charmant vaurien », la mère fait des ménages et lave le linge, pour assurer les besoins de la famille. Situé un peu en dehors du centre de Berne, le quartier Steinhölzli où habite la famille est peuplé de personnes de condition modeste. On y cultive des jardins potagers pour pouvoir en partie s‘autoalimenter. Bob Steffen ne connait pas le luxe en tant qu‘enfant et adolescent.
En 1943 – Bob fréquente encore l‘école – il fait la connaissance, dans le quartier chaud autour de la gare centrale de Berne, d‘un chirurgien nommé Juri. Celui-ci le présente à Werner Bandi, âgé de cinquante-deux ans à l‘époque qui est toujours en quête de modèles de nu. De cette rencontre naît une relation qui durera vingt ans.
Pendant la guerre, Bob, avec le consentement de sa mère, accompagne Werner Bandi plusieurs fois au Tessin, à Ascona et la vallée de la Maggia. Plus tard, lorsqu‘on pouvait à nouveau quitter la Suisse, les deux hommes se rendront à Ischia et feront des croisières ensemble.
Bob Steffen par Werner Bandi sur l'Augustus Genova
Dans les années 1949, 1950 et 1951, le couple inégal passe des vacances à bord de l‘ « Augustus Genova » et d‘autres navires de luxe. Le jeune homme séduisant réussira de faire sortir Bandi de sa réserve vis-à-vis d‘autrui. Celui-ci a le plus souvent sa camera sous la main et photographie Bob lorsqu‘il danse, dîne, flirte ou flâne – en costard élégant, en tenue décontractée, en maillot de bain ou dans le plus simple appareil.
Bob Steffen, en haute mer, Werner Bandi, vers 1950
Bob Steffen, autoportrait, vers 1955
Avant de mourir, en 1964, Bandi ne peut désigner Bob Steffen, alors déjà décorateur d‘intérieur à succès, comme légataire universel – malgré ses intentions dans ce sens. Par contre, son trésor photographique, ses photos de nu et les prises de vue de leurs voyages et croisières en commun, il les lui avait déjà mis à disposition plus tôt.
En 2012, Bob Steffen cède à son tour son fonds photographique à l‘association « Bob, le Flaneur », qui, en 2015, met en scène au Kornhausforum de Berne l‘exposition au nom homonyme, consacrée à sa vie et son oeuvre.
En 1942, le paragraphe du Code pénal suisse réprimant des actes homosexuels est aboli. La Suisse représente alors un cas à part. Cela permet aussi la création de la revue « Le Cercle » à Zurich, qui sera pendant de longues années l‘unique publication pour homosexuels au monde.
Le film « Le Cercle » de Stefan Haupt et le livre « Der Kreis – Eine Sammlung » témoignent de manière impressionnante des luttes émancipatoires et de l‘ambiance répressive de l‘époque. Werner Bandi a dû être l‘un des abonnés du « Cercle », en 1946, sa première photo paraît dans cette revue. Tous les auteurs et photographes du « Cercle » utilisent des pseudonymes: Karlheinz Weinberger s‘appelle « Jim », George Platt Lynes devient « Roberto Rolf », Konrad Helbig s‘appelle « Petronius » et Werner Bandi simplement « un photographe suisse » ou pire comme anonyme.
Photo Werner Bandi
Photo Werner Bandi
Dans Le Cercle, la reproduction du nu intégral n‘étant pas possible, les parties génitales étaient soit retouchées soit la photo en question était distribuée à part en petit nombre, au format 8 × 12 cm, dans une enveloppe neutre, glissée dans une partie du tirage de la revue, par le biais du « Bilderdienst » (service des images).
Le plus fort tirage du Cercle se situera bien plus tard à quelque deux mille exemplaires et on estime que seul environ une centaine de photos à la fois ont été expédiées grâce au Bilderdienst. Et ce sont précisément ces photos que Werner Bandi avait fournies au service des images, ou le peu qui en a été préservée au fil du temps, qui réapparaissent occasionnellement sur le marché de l‘art.
A coté de Bob Steffen, il y a d‘autres hommes qui ont servi de modèle à Werner Bandi, sans toutefois pouvoir être identifiés. Toutes les photos mettant en scène des nus ont été prises dans la nature et beaucoup dans les environs proches de Spiez. Le lac de Thoune, le Kiental, le paysage montagnard sauvage autour du lac Oeschinen, avec les montagnes de plus de trois mille mètres Doldenhorn, Fründenhorn et Blüemlisalp servent de décor pour les photos de Bandi et jouent un rôle étrangement imposant. Il semble parfois que ce sont les parois rocheuses massives, les arbres tourmentés ou la mer près d‘Ischia et non pas le modèle qui détermine la photo.
Auf dem Felsen (Sur le rocher), 1945
Auf der Bergwiese (Sur la prairie de montagne), 1944
Auf der Lichtung (Dans la clairière), 1945
Bob, Berner Oberland (Oberland bernois), 1945
Le témoin de l‘époque, Ernst Ostertag commente: « Les photos préférées du service des images – aussi les plus sollicitées des abonnés – sont celles prises dehors, dans la nature sauvage. Grâce au petit format, elles pouvaient tout à fait être considérés comme des photos que l‘on avait fait soi-même ou reçu en cadeau, en guise de souvenir d‘un retour de vacances. Même si elles étaient découvertes par hasard, lors d‘une visite de famille ou en cas d‘accident, de fouille ou de mort si elles devaient tomber en de mauvaises mains. »
A cette théorie s‘oppose la mise en scène des poses, dont les modèles ne se rendaient probablement pas compte mais les photographes et une partie des lecteurs du Cercle en étaient certes conscients. Les classiques ou des œuvres connues sont reproduits ou adaptés avec récurrence: le Jeune homme nu assis en bord de la mer de Hippolyte Flandrin (1837, Louvre, Paris) existe en version Werner Bandi – évidemment photographié au lac de Thoune. D‘autres photographes, dont F. Holland Day, Wilhelm von Gloeden, Wilhelm von Plueschow ou plus tard Robert Mapplethorpe en ont fait leur version également.
Bob Steffen photographie de nu pour le magazine Der Kreis
Des accessoires, tels un arc avec sa flèche, on en retrouve fréquemment chez Werner Bandi. Souvent un bateau à rames sert de décor, et ne serait-ce que parce qu‘on peut photographier plus aisément loin des rivages. Imaginons aussi les efforts consentis pour amener un cheval en forêt afin de photographier un jeune homme nu sur son dos!
Im Wald (Dans la forêt), 1946
Mit Pfeil und Bogen (Avec arc et flèche), 1945
Bob Steffen
Sans doute, chaque photo de Werner Bandi est sujette à une forte intention créatrice, chaque position du bras, de la jambe ou de la tête légèrement étirée suivent certaines indications – rien ne semble laissé au hasard. Pour ce motif, les aménagements et surtout les poses des modèles peuvent paraître scénarisés d‘un point de vue contemporain. Bandi s‘inscrit ainsi dans la tradition photographique arcadienne, mais pour lui, les bords de la Méditerranée sont inaccessibles à cause de la guerre, il ne pourra les visiter que plus tard, raison pour laquelle les montagnes et lacs suisses deviennent son Arcadie.
Rückenakt (Nu de dos), 1946
Freunde (Amis), 1945
La technique photographique de 1900 avec ses longs temps d‘exposition demande toujours une certaine pose, un certain arrêt sur image dans le mouvement. Bandi, avec surement une technique plus moderne à disposition, s‘imprègne quand même de l‘esthétique qui s‘en dégage, et en fait son style marquant. Ce n‘est pas la modernité photographique des années vingt à trente qui le tente, ni les « nus héroïques » des nazis qui semblent l‘intéresser, du moins ils n‘ont pas d‘influence sur son oeuvre.
Bob Steffen als Aktmodell in klassischer Pose am Öschinensee, 1944
Il crée en 1943 sur l‘îlot Suisse visiblement un monde propre à lui. Werner Bandi, bien que photographe amateur, laisse une oeuvre particulière d‘une beauté singulière qui n‘est pas sans raison souvent attribuée à tort aux années trente. Il est établi que peu de matériel de cette époque a survécu, chacune des diapositives retrouvées grâce à la transmission à Bob au moment opportun représente une vraie aubaine. L‘épicurien Bob Steffen divertissait volontiers ses innombrables visiteurs avec des anecdotes de ses rencontres amoureuses, farfouillant dans les tiroirs, caissons, enveloppes et montrait ses photos. Il mentionnait souvent vouloir classer ces photos éparpillées dans des cartons imprégnés de goudron et de nicotine.
(Texte : Veronika Minder, Björn Koll Verein « Bob, le Flaneur »)
Les photos de Bob
Bob, Blüemlisalp, Bob Steffen 1945
Bob, Der Bogenschütze (L'archer), Bob Steffen 1945
Bob Vor dem Doldenhorn (Sommet de Suisse), 1944
Bob Vor der Berghütte (Devant le refuge de montagne), 1944
Im Kiental (Vallée de Suisse), Bob Steffen 1945
Libellés :
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Politique
vendredi 26 janvier 2018
Anders als die Andern, 1919. Allemagne
Richard Oswald et Magnus Hirschfeld
Différent des autres (Anders als die Andern) est un film allemand de 1919, réalisé par Richard Oswald, et écrit par Richard Oswald et Magnus Hirschfeld, médecin allemand et cofondateur en 1897 du Comité scientifique humanitaire, le WhK. Ce film est l'un des tout premiers à défendre la cause des homosexuels. Il dénonce le paragraphe 175, qui pénalisait alors toute relation homosexuelle entre hommes en Allemagne.
Magnus Hirschfeld
Le violoniste virtuose Paul Körner (Conrad Veidt) est victime de chantage de la part du prostitué Franz Bollek. Körner refuse de continuer à payer toujours plus d'argent au maître-chanteur, Bollek le dénonce pour infraction au paragraphe 175. Au cours du procès qui s'ensuit, le docteur Magnus Hirschfeld (qui joue son propre rôle), prononce un ardent plaidoyer contre l'intolérance et la discrimination dont sont victimes les homosexuels. Bollek est condamné pour extorsion de fonds, mais Körner est néanmoins condamné pour avoir enfreint le paragraphe 175. Sa réputation est ruinée, il ne supporte pas l'opprobre public et finit par se suicider.
Conrad Veidt
Le synopsis de Anders als die Andern fut élaboré par Richard Oswald avec l'aide du Dr. Magnus Hirschfeld, qui joua un petit rôle dans le film et qui participa au financement de la production par l'intermédiaire de son Institut de sexologie. Hirschfeld souhaitait utiliser l'exemple du film comme argument contre les lois en vigueur en Allemagne et notamment le paragraphe 175. Celui-ci faisait de l'homosexualité un délit passible de poursuites, mettant un grand nombre de personnes dans une situation analogue à celle du personnage incarné par Conrad Veidt.
Conrad Veidt (Paul Körner) et le docteur Magnus Hirschfeld
Magnus Hirschfeld
La direction de la photographie fut confiée à Max Fassbender, qui avait travaillé sur Le Portrait de Dorian Gray deux ans auparavant, dans une des premières mises en scène du classique d'Oscar Wilde. Richard Oswald n'était pas encore le metteur en scène de renom qu'il allait devenir, de même que son fils Gert. L'acteur principal, Conrad Veidt devait bientôt connaître la célébrité pour son rôle dans Le Cabinet du docteur Caligari.
Le Cabinet du docteur Caligari.
Anders als die Andern a marqué l'histoire du cinéma en présentant pour la première fois un homosexuel auquel le spectateur pouvait s'identifier. L'intrigue principale inspira celle du film anglais Victim, avec Dirk Bogarde. Les lois de censure qui furent votées en réaction à ce genre de film finirent par en limiter les projections à un public de médecins et de chercheurs, et les affiches du film finirent parmi les nombreuses œuvres prétendument "décadentes" qui furent brûlées par les nazis après l'élection d'Hitler en 1933.
Un étudiant allemand et un nazi SA dans la bibliothèque du Dr. Magnus Hirschfeld en 1933
Le film fut censuré en 1920 et les copies détruites. En 1927, Magnus Hirschfeld tourna un document intitulé les lois de l'amour (Gesetze der Liebe) dans lequel il inclut une version courte de Anders als die Andern pour illustrer la question de l'homosexualité. Le documentaire s'attira lui aussi les foudres de la censure ; mais une copie avait été introduite en Ukraine, où elle avait été sous-titrée dans la langue de ce pays. Cette version fut redécouverte à la fin des années 1970 et se trouve au musée de la ville de Munich
Anders als die Andern
Titre : Anders als die Andern
Réalisation : Richard Oswald
Scénario : Richard Oswald et Magnus Hirschfeld
Photographie : Max Fassbender
Pays d'origine : Allemagne
Format : Noir et blanc - 1,85:1 - Film muet - 35 mm
Genre : Drame
Durée : 50 minutes
Date de sortie : 30 juin 1919
Avec: Conrad Veidt (Paul Körner), Fritz Schulz (Kurt Sivers), Reinhold Schünzel (Franz Bollek), Magnus Hirschfeld (médecin et sexologue) Anita Berber (Else Sivers)
Libellés :
Anders als die Andern,
Cinéma,
droits homosexuels,
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Histoire,
homophobie,
Politique
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