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"La différence entre l'érotisme et la pornographie c'est la lumière". Bruce LaBruce
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samedi 14 avril 2018

Roger Descombes, 1915-1979. Suisse 


Les amours de Verlaine et Rimbauld


















































dimanche 1 novembre 2015




Arthur Rimbaud, 1854-1891. France






Rimbaud in New York, David Wojnarowicz, 1977-79




LE CŒUR VOLÉ


Mon triste cœur bave à la poupe,
Mon cœur couvert de caporal :
Ils y lancent des jets de soupe
Mon triste coeur bave à la poupe :
Sous les quolibets de la troupe
Qui pousse un rire général,
Mon triste coeur bave à la poupe,
Mon coeur couvert de caporal.
Ithyphalliques et pioupiesques
Leurs quolibets l’ont dépravé.
Au gouvernail, on voit des fresques
Ithyphalliques et pioupiesques.
O flots abracadabrantesques
Prenez mon cœur, qu’il soit lavé.
Ithyphalliques et pioupiesques
Leurs quolibets l’ont dépravé !
Quand ils auront tari leurs chiques
Comment agir, ô cœur volé ?
Ce seront des hoquets bachiques
Quand ils auront tari leurs chiques
J’aurai des sursauts stomachiques
Moi, si mon coeur est ravalé:
Quand ils auront tari leurs chiques,
Comment agir, ô cœur volé ?

Arthur Rimbaud, Mai 1871




dimanche 30 août 2015




Arthur Rimbaud, vers 1871 (17 ans)










Les Étrennes des orphelins, 1869

I


La chambre est pleine d'ombre ; on entend vaguement
De deux enfants le triste et doux chuchotement.
Leur front se penche, encore alourdi par le rêve,
Sous le long rideau blanc qui tremble et se soulève...
— Au dehors les oiseaux se rapprochent frileux ;
Leur aile s'engourdit sous le ton gris des cieux ;
Et la nouvelle Année, à la suite brumeuse,
Laissant traîner les plis de sa robe neigeuse,
Sourit avec des pleurs, et chante en grelottant...

II

Or les petits enfants, sous le rideau flottant,
Parlent bas comme on fait dans une nuit obscure.
Ils écoutent, pensifs, comme un lointain murmure...
Ils tressaillent souvent à la claire voix d'or
Du timbre matinal, qui frappe et frappe encor
Son refrain métallique et son globe de verre...
— Puis, la chambre est glacée... on voit traîner à terre,
Épars autour des lits, des vêtements de deuil :
L'âpre bise d'hiver qui se lamente au seuil
Souffle dans le logis son haleine morose !
On sent, dans tout cela, qu'il manque quelque chose...
— Il n'est donc point de mère à ces petits enfants,
De mère au frais sourire, aux regards triomphants ?
Elle a donc oublié, le soir, seule et penchée,
D'exciter une flamme à la cendre arrachée,
D'amonceler sur eux la laine de l'édredon
Avant de les quitter en leur criant : pardon.
Elle n'a point prévu la froideur matinale,
Ni bien fermé le seuil à la bise hivernale ?...
— Le rêve maternel, c'est le tiède tapis,
C'est le nid cotonneux où les enfants tapis,
Comme de beaux oiseaux que balancent les branches,
Dorment leur doux sommeil plein de visions blanches !...
— Et là, — c'est comme un nid sans plumes, sans chaleur,
Où les petits ont froid, ne dorment pas, ont peur ;
Un nid que doit avoir glacé la bise amère...

III

Votre cœur l'a compris : — ces enfants sont sans mère.
Plus de mère au logis ! — et le père est bien loin !...
— Une vieille servante, alors, en a pris soin.
Les petits sont tout seuls en la maison glacée ;
Orphelins de quatre ans, voilà qu'en leur pensée
S'éveille, par degrés, un souvenir riant...
C'est comme un chapelet qu'on égrène en priant :
— Ah ! quel beau matin, que ce matin des étrennes !
Chacun, pendant la nuit, avait rêvé des siennes
Dans quelque songe étrange où l'on voyait joujoux,
Bonbons habillés d'or, étincelants bijoux,
Tourbillonner, danser une danse sonore,
Puis fuir sous les rideaux, puis reparaître encore !
On s'éveillait matin, on se levait joyeux,
La lèvre affriandée, en se frottant les yeux...
On allait, les cheveux emmêlés sur la tête,
Les yeux tout rayonnants, comme aux grands jours de fête,
Et les petits pieds nus effleurant le plancher,
Aux portes des parents tout doucement toucher...
On entrait !... Puis alors les souhaits... en chemise,
Les baisers répétés, et la gaîté permise !

IV

Ah ! c'était si charmant, ces mots dits tant de fois !
— Mais comme il est changé, le logis d'autrefois :
Un grand feu pétillait, clair, dans la cheminée,
Toute la vieille chambre était illuminée ;
Et les reflets vermeils, sortis du grand foyer,
Sur les meubles vernis aimaient à tournoyer...
— L'armoire était sans clefs !... sans clefs, la grande armoire !
On regardait souvent sa porte brune et noire...
Sans clefs !... c'était étrange !... on rêvait bien des fois
Aux mystères dormant entre ses flancs de bois,
Et l'on croyait ouïr, au fond de la serrure
Béante, un bruit lointain, vague et joyeux murmure...
— La chambre des parents est bien vide, aujourd'hui :
Aucun reflet vermeil sous la porte n'a lui ;
Il n'est point de parents, de foyer, de clefs prises :
Partant, point de baisers, point de douces surprises !
Oh ! que le jour de l'an sera triste pour eux !
— Et, tout pensifs, tandis que de leurs grands yeux bleus,
Silencieusement tombe une larme amère,
Ils murmurent : "Quand donc reviendra notre mère ?"
...........................................................................

V

Maintenant, les petits sommeillent tristement :
Vous diriez, à les voir, qu'ils pleurent en dormant,
Tant leurs yeux sont gonflés et leur souffle pénible !
Les tout petits enfants ont le cœur si sensible !
— Mais l'ange des berceaux vient essuyer leurs yeux,
Et dans ce lourd sommeil met un rêve joyeux,
Un rêve si joyeux, que leur lèvre mi-close,
Souriante, semblait murmurer quelque chose...
— Ils rêvent que, penchés sur leur petit bras rond,
Doux geste du réveil, ils avancent le front,
Et leur vague regard tout autour d'eux se pose...
Ils se croient endormis dans un paradis rose...
Au foyer plein d'éclairs chante gaiement le feu...
Par la fenêtre on voit là-bas un beau ciel bleu ;
La nature s'éveille et de rayons s'enivre...
La terre, demi-nue, heureuse de revivre,
A des frissons de joie aux baisers du soleil...
Et dans le vieux logis tout est tiède et vermeil :
Les sombres vêtements ne jonchent plus la terre,
La bise sous le seuil a fini par se taire...
On dirait qu'une fée a passé dans cela !...
— Les enfants, tout joyeux, ont jeté deux cris... Là,
Près du lit maternel, sous un beau rayon rose,
Là, sur le grand tapis, resplendit quelque chose...
Ce sont des médaillons argentés, noirs et blancs,
De la nacre et du jais aux reflets scintillants ;
Des petits cadres noirs, des couronnes de verre,
Ayant trois mots gravés en or : "À NOTRE MÈRE !"
......................................................................





vendredi 13 décembre 2013




Michael Ayrton, 1921 - 1975. Angleterre




Verlaine et Rimbaud 




Illustrations pour le recueil de poèmes Hombres écrit en 1891 par Paul Verlaine, 1972





Femmes et Hombres ont été composés en 1889 et 1891. Publié d'abord sous le titre D'Aulcunes et sous pseudonyme, Femmes fut saisi par la police ; Hombres paraît seulement en 1903, après la mort de Verlaine, avec la mention : « Imprimé sous le manteau et ne se vend nulle part. » Longtemps mis à l'index, les poèmes qui composent ce recueil sont d'une sensualité extrême, empreinte d'élégante luxure.








Dans ce café




Dans ce café bondé d’imbéciles, nous deux
Seuls nous représentions le soi-disant hideux
Vice d’être « pour homme » et sans qu’ils s’en doutassent
Nous encagnions ces cons avec leur air bonasse,
Leurs normales amours et leur morale en toc,
Cependant que, branlés et de taille et d’estoc
A tire-larigot, à gogo, par principes
Toutefois, voilés par les flocons de nos pipes,
(Comme autrefois Héro copulait avec Zeus),
Nos vits tels que des nez joyeux et Karrogheus
Qu’eussent mouchés nos mains d’un geste délectable,
Éternuaient des jets de foutre sous la table.








Verlaine et Rimbaud



LE SONNET DU TROU DU CUL

Par Arthur Rimbaud et Paul Verlaine


En forme de parodie d’un volume d’Albert Mérat, intitulé l’Idole, où sont détaillées toutes les beautés d’une dame : Sonnet du front, sonnet des yeux, sonnet des fesses, sonnet du..... dernier sonnet.


Paul Verlaine Fecit
Obscur et froncé comme un œillet violet
Il respire, humblement tapi parmi la mousse
Humide encor d’amour qui suit la fuite douce
Des fesses blanches jusqu’au bord de son ourlet.

Des filaments pareils à des larmes de lait
Ont pleuré, sous l’auteur cruel qui les repousse,
A travers de petits caillots de marne rousse,
Pour s’en aller où la pente les appelait.

Arthur Rimbaud Invenit
Ma bouche s’accouple souvent à sa ventouse
Mon âme, du coït matériel jalouse,
En fit son larmier fauve et son nid de sanglots

C’est l’olive pâmée et la flûte câline
C’est le tube où descend la céleste praline
Chanaan féminin dans les moiteurs éclos.








Ô ne blasphème pas, poète




O ne blasphème pas, poète, et souviens-toi.
Certes la femme est bien, elle vaut qu’on la baise,
Son cul lui fait honneur, encor qu’un brin obèse
Et je l’ai savouré maintes fois, quant à moi.

Ce cul (et les tétons) quel nid à nos caresses !
Je l’embrasse à genoux et lèche son pertuis
Tandis que mes doigts vont fouillant dans l’autre puits
Et les beaux seins, combien cochonnes leurs paresses !

Et puis, il sert, ce cul, encor, surtout au lit
Comme adjuvant aux fins de coussins, de sous-ventre,
De ressort à boudin du vrai ventre pour qu’entre
Plus avant l’homme dans la femme qu’il élit,

J’y délasse mes mains, mes bras aussi, mes jambes,
Mes pieds. Tant de fraîcheur, d’élastique rondeur
M’en font un reposoir désirable où, rôdeur,
Par instant le désir sautille en vœux ingambes.

Mais comparer le cul de l’homme à ce bon cu
À ce gros cul moins voluptueux que pratique
Le cul de l’homme fleur de joie et d’esthétique
Surtout l’en proclamer le serf et le vaincu,

« C’est mal, » a dit l’amour. Et la voix de l’Histoire.
Cul de l’homme, honneur pur de l’Hellade et décor
Divin de Rome vraie et plus divin encor,
De Sodome morte, martyre pour sa gloire.

Shakspeare, abandonnant du coup Ophélia,
Cordélia, Desdémona, tout son beau sexe
Chantait en vers magnificents qu’un sot s’en vexe
La forme masculine et son alleluia.

Les Valois étaient fous du mâle et dans notre ère
L’Europe embourgeoisée et féminine tant
Néanmoins admira ce Louis de Bavière,
Le roi vierge au grand cœur pour l’homme seul battant.

La Chair, même, la chair de la femme proclame
Le cul, le vit, le torse et l’œil du fier Puceau,
Et c’est pourquoi d’après le conseil à Rousseau,
Il faut parfois, poète, un peu « quitter la dame ».







Balanide I



C’est un plus petit cœur
Avec la pointe en l’air ;
Symbole doux et fier
C’est un plus tendre cœur.

Il verse ah ! que de pleurs
Corrosifs plus que feu
Prolongés mieux qu’adieu,
Blancs comme blanches fleurs!

Vêtu de violet,
Fait beau le voir yssir,
Mais à tout le plaisir
Qu’il donne quand lui plaît!

Comme un évêque au chœur
Il est plein d’onction
Sa bénédiction
Va de l’autel au chœur.

Il ne met que du soir
Au réveil auroral
Son anneau pastoral
D’améthyste et d’or noir.

Puis le rite accompli,
Déchargé congrûment,
De ramener dûment
Son capuce joli.






Il est mauvais coucheur




Il est mauvais coucheur et ce m’est une joie
De le bien sentir, lorsqu’il est la fière proie
Et le fort commensal du meilleur des sommeils
Sans fausses couches — nul besoin ? et sans réveils,
Si près, si près de moi que je crois qu’il me baise,
En quelque sorte, avec son gros vît que je sens
Dans mes cuisses et sur mon ventre frémissants
Si nous nous trouvons face à face, et s’il se tourne
De l’autre côté, tel qu’un bon pain qu’on enfourne
Son cul délicieusement rêveur ou non,
Soudain, mutin, malin, hutin, putain, son nom
De Dieu de cul, d’ailleurs choyé, m’entre en le ventre,
Provocateur et me rend bandeur comme un { chantre,
                                                                  { diantre,
Ou si je lui tourne semble vouloir
M’enculer ou, si dos à dos, son nonchaloir
Brutal et gentil colle à mes fesses ses fesses,
Et mon vît de bonheur, tu mouilles, puis t’affaises
Et rebande et remouille, — infini dans cet us.

Heureux moi ? Totus in benigno positus :








Monte sur moi




Monte sur moi comme une femme
Que je baiserais en gamin
Là. C’est cela. T’es à ta main?
Tandis que mon vit t’entre, lame

Dans du beurre, du moins ainsi
Je puis te baiser sur la bouche,
Te faire une langue farouche
Et cochonne et si douce, aussi!

Je vois tes yeux auxquels je plonge
Les miens jusqu’au fond de ton cœur
D’où mon désir revient vainqueur
Dans une luxure de songe.

Je caresse le dos nerveux,
Les flancs ardents et frais, la nuque,
La double mignonne perruque
Des aisselles et les cheveux!

Ton cul à cheval sur mes cuisses
Les pénètre de son doux poids
Pendant que s’ébat mon lourdois
Aux fins que tu te réjouisses,

Et tu te réjouis, petit,
Car voici que ta belle gourle
Jalouse aussi d’avoir son rôle,
Vite, vite, gonfle, grandit,

Raidit... Ciel! la goutte, la perle
Avant-courrière vient briller
Au méat rose : l’avaler,
Moi, je le dois, puisque déferle

Le mien de flux, or c’est mon lot
De faire tôt d’avoir aux lèvres
Ton gland chéri tout lourd de fièvres
Qu’il décharge en un royal flot.

Lait suprême, divin phosphore
Sentant bon la fleur d’amandier,
Où vient l’âpre soif mendier,
La soif de toi qui me dévore

Mais il va, riche et généreux,
Le don de ton adolescence,
Communiant de ton essence,
Tout mon être ivre d’être heureux.







Ô mes amants




Ô mes amants,
Simples natures,
Mais quels tempéraments !
Consolez-moi de ces mésaventures
Reposez-moi de ces littératures,
Toi, gosse pantinois, branlons-nous en argot,
Vous, gas des champs, patoisez moi l’écot,
Des pines au cul et des plumes qu’on taille,
Livrons-nous dans les bois touffus
La grande bataille
Des baisers confus.
Vous, rupins, faisons-nous des langues en artistes
Et merde aux discours tristes,
Des pédants et des cons.
(Par cons, j’entends les imbéciles,
Car les autres cons sont de mise
Même pour nous, les difficiles,
Les spéciaux, les servants de la bonne Église
Dont le pape serait Platon
Et Socrate un protonotaire
Une femme par-ci, par-là, c’est de bon ton
Et les concessions n’ont jamais rien perdu
Puis, comme dit l’autre, à chacun son dû
Et les femmes ont, mon dieu, droit à notre gloire
Soyons-leur doux,
Entre deux coups
Puis revenons à notre affaire).
Ô mes enfants bien aimés, vengez-moi
Par vos caresses sérieuses
Et vos culs et vos nœuds régals vraiment de roi,
De toutes ces viandes creuses
Qu’offre la rhétorique aux cervelles breneuses
De ces tristes copains qui ne savent pourquoi.
Ne métaphorons pas, foutons
Pelotons nous bien les roustons
Rinçons nos glands, faisons ripailles
Et de foutre et de merde et de fesses et de cuisses.