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Le parcours et le travail de Jean-Luc Verna sont extrêmement singuliers. Etre particulier, chez qui l’homosexualité a du apparaitre très tôt, le malaise familial devant cette enfant si particulier, le rejet, voire la haine, « famille inculte, réactionnaire et stupide ». « parti de chez ses parents à 14 ans, la rue, [la] prostitution ».
« J’ai toujours dessiné pour m’abstraire de mon milieu familial quand j’étais petit et après pour amuser les copains, quand j’étais en bande, ou de temps en temps pour gagner un peu de fric, rarement ».
« Et quand il a fallu que je sorte de la rue parce qu’il y avait trop de défonce, que mes amis commençaient à crever, que c’était moins fun, que ça faisait six ans que j’étais pute, je me suis dit que soit je me mettais à faire du porno. »
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« Ça a été une réelle question pour moi parce que la sexualité a été un des premiers trucs que j’ai découverts dans la liberté, et puis par mon métier. Donc j’ai fait la somme de mes talents et je me suis dit que la seule chose qui me restait, c’était de vivre de ce que je savais faire. Je savais danser, chanter, dessiner. Enfin, je « savais » entre guillemets, j’avais des aptitudes pour ces trois trucs… Je me suis dit allez je dessine, donc je suis allé en école d’art, à la Villa Arson, et c’est là que j’ai tout découvert. »
Après 6 ans de prostitution, Verna entre donc à l’école d’art de la villa Arson, à Nice. Le dessin, le cinéma, la musique, la photographie ou sur sa propre peau sont les supports de son imagination. L’artiste a travaillé son corps (comme le fait Orlan dans un tout autre registre), s’est musclé, tatoué, piercé, rasé, pour en faire le vecteur de son travail. C’est lui même ou une version sublimée, enfin libérée de lui-même qu’il met en scène.
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Outre le dessin, le travail principal de Jean-Luc Verna, est d’utiliser son corps nu pour faire se juxtaposer les figures iconiques de l’histoire de l’art et des personnages de la musique pop, rock de la scène musicale des années 70-80. Nu sur fond blanc, il crée par cela, en prenant une pose adaptée, travaillée, censée être le trait d’union entre les deux époques, un troisième univers dont son corps est le centre. Trois univers de trois époques différentes se rencontrent.
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Ainsi Nina Hagen en concert rencontre la Petite danseuse de quatorze ans de Degas ou Siouxsie, joue du tambourin, en écho aux nymphes de la Fontaine des Innocents de Jean Goujon. Le Serge Lifar de 1930 rencontre L’Iggy pop de 1969.
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Ses poses sont l’incarnation de son corps, celle du modèle des chefs-d’œuvre de la peinture ou la sculpture et du chanteur. L’artiste unit ainsi le temps, la culture de l’art, le masculin et le féminin.
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Ce travail dépasse la photographie, puisqu’il le réemploie pour des performances, comme dans le spectacle, I Apologize, chorégraphié par Gisèle Vienne, où il enchaine des séries de poses, mêlant son univers, l’histoire de l’art et la scène rock.
Jean-Luc Verna s’est créé un personnage qui est le même dans son art et dans la vie.
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Depuis 2004, le titre de ses expositions, plein d’ironie, de revendication et de liberté assumée, Vous n'êtes pas un peu beaucoup maquillé? — Non, résonne comme une provocation et un appel à la liberté et la tolérance. Assumant l’outrance, il défend un droit à la différence, non seulement vis-à-vis des hétérosexuels, mais aussi du « milieu » homosexuel formaté, uniformisé qu’il déteste. « Je ne suis pas gay, je suis pédé » ; «les gays sont des métrosexuels ». Il sent que lorsqu’il débarque dans le marais avec ses jeans, chaps et cockring, même si le reste plait, ses faux cils choquent.
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Les dessins de Verna, participent du même principe de juxtaposition et de transformation. Le travail sur papier est photocopié, le trait est grossi rendu flou par l’agrandissement. La photocopie est ensuite frottée au trichloréthylène, déposée sur du papier, et rehaussée de crayons et de fards.
Dans le dessin, comme dans la photographie ou la performance, l’art de Jean-Luc Verna tourne autour du travestissement, de la transformation, nous interrogeant nous –même sur la question : quel est notre propre visage ?
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Jean-Luc Verna est actuellement professeur à la villa Arson à Nice, il vit et travaille à Paris et est représenté par la galerie Air de Paris.
Apollon et Daphnée - Jean-Luc Verna et François Sagat
(Extrait de l'interview de Jean-Luc Verna par VALERIA COSTA-KOSTRITSKY sur Viceland.com)
Très difficile, j'aime.
RépondreSupprimertrès bel hommage dans ce joli article, merci Snoopy :)
RépondreSupprimervoila un dossier tres complet sur mon travail!,joignez moi si vous voullez en plus parler de mon travail musical
RépondreSupprimerbravo et merci encore
jlv