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"La différence entre l'érotisme et la pornographie c'est la lumière". Bruce LaBruce
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vendredi 21 août 2015




Vincent van Gogh 





Zouave, 1888. Huile sur toile, 81 × 65 cm. Collection particulière





Lettre de vincent à Théo – vers le 21 juin 1888



J’ai enfin un modèle – un Zouave – c’est un garçon à petite figure, à cou de taureau, à l’oeil de tigre, et j’ai commencé par un portrait et recommencé par un autre. Le buste que j’ai peint de lui était horriblement dur, en uniforme du bleu des casseroles émaillées bleues, à passementerie d’un rouge orangé fané, avec deux étoiles citron sur la poitrine, un bleu commun et bien dur à faire.

La tête féline, très bronzée, coiffée d’un bonnet garance, je l’ai plaquée contre une porte peinte en vert et les briques orangées d’un mur. C’est donc une combinaison brutale de tons disparates pas commode à mener.

L’étude que j’en ai fabriquée me parait très dure et pourtant je voudrais toujours travailler à des portraits vulgaires et même criards comme cela. Cela m’apprend et voilà ce que je demande surtout à mon travail.





Lettre de vincent à Emile Bernard – vers le 26 juin 1888




Tu fais très bien de lire la Bible. L’étude du Christ donne inévitablement la névrose artistique, surtout dans mon cas où c’est compliqué par le culottage de pipes innombrables.

La bible, c’est le christ, car l’ancien testament tend vers ce sommet. Saint Paul et les évangélistes occupent l’autre pente de la montagne sacrée.

Que c’est petit, cette histoire ! Mon dieu, voilà. Il n’y a donc que ces juifs au monde, qui commencent par déclarer tout ce qui n’est pas eux, impur.

Les autres peuples sous le grand soleil de là-bas, les Egyptiens, les Indiens, les Ethiopiens, Babylone, Ninive, que n’ont ils leurs annales écrites avec le même soin ! Enfin, l’étude de cela c’est beau, et enfin savoir tout lire équivaudrait presque à ne pas savoir lire du tout.

Mais la consolation de cette bible si attristante qui soulève notre désespoir et notre indignation – nous navre pour de bon, tout outrés par sa petitesse et sa folie contagieuse – la consolation qu’elle contient, comme un noyau dans une écorce dure, une pulpe amère, c’est le christ.

[…]

La science – le raisonnement scientifique - me parait être un instrument qui ira bien loin dans la suite.

Car voici : On a supposé la terre plate. C’était vrai ; elle l’est encore aujourd’hui, de Paris à Asnières, par exemple.

Seulement n’empêche que la science prouve que la terre est surtout ronde. Ce qu’actuellement personne ne conteste.

Or, actuellement, on en est encore, malgré ça, à croire que la vie est plate et va de la naissance à la mort.

Seulement, elle aussi, la vie, est probablement ronde, et très supérieure en étendue et capacité à l’hémisphère unique qui nous est à présent connu.

Des générations futures, il est probable, nous éclairciront à ce sujet si intéressant ; et alors la Science elle-même pourrait – ne lui déplaise – arriver à des conclusions plus ou moins parallèles aux dictions du christ relatives à l’autre moitié de l’existence.

[…]

A propos de la toile Le zouave:

C’est très laid ce que j’ai foutu : un dessin du zouave assis, une esquisse peinte du zouave contre un mur tout blanc, et enfin son portrait contre une porte verte et quelques briques orangées d’un mur. C’est dur et enfin laid et mal foutu. Pourtant, puisque c’est de la vraie difficulté attaquée, ça peut aplanir la route dans l’avenir.





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