Jean Cocteau
Francis Picabia, Portrait de Jean Cocteau, 1921,
Aquarelle, crayon, encre sur papier contrecollé sur carton, 26,8 x 20,7 cm, Paris, Centre Pompidou.
Le secret professionnel, 1922
« Le vrai écrivain est celui qui écrit mince, musclé. Le reste est graisse ou maigreur. Il y a dans le tireur excentrique, toujours si à la mode, un terrible mélange de graisse et de maigreur. »
En 1921, année où Cocteau commence l'écriture de "Le secret Professionnel", l'artiste est en pleine romance avec Raymond Radiguet, jeune poète rencontré en 1919 lors d'un hommage à Apollinaire donné à la galerie « L’effort moderne » de Léonce Rosenberg. Le coup de foudre est immédiat. Cocteau prend sous son aile le jeune homme de 16 ans (Cocteau en a trente), il le fait travailler, le conseille, l'encourage et le présente aux cercles littéraires.
Au mois d’août et septembre, les deux hommes partent au Piquey. Ils sont en pleine émulation artistique. Tandis que Radiguet s'attelle à l'écriture du Diable au Corps, Cocteau se penche sur "un bilan de l'esprit poétique" qui deviendra, en 1922, Le secret professionnel. Cocteau est influencé dans ce retour au classicisme par Radiguet.
Cocteau et Radiguet fréquentent assidûment Le Bœuf sur Le Toit, rue Boissy-d’Anglas, tenu par Moysès.
Les amours des deux hommes sont tumultueuses. L'année de la parution du Secret Professionel, Radiguet s'enfuie à Marseille et en corse avec Brancusi. Leur séparation va durer quatre mois. Puis après s'être réconciliés, il partent pour le Lavandou toujours emprunts de ferveur créatrice.
(source: site officiel de Jean cocteau)
Edition de 1922, Chez Delamain, Boutelleau & Cie, Librairie Stock, Coll. Paris.
Collection Les contemporains, 1922 14 x 9,8 cm, broché, 79 pp.
Autographe de Cocteau à Darius [Milhaud] : "A mon cher Darius tendre souvenir de Jean Cocteau, 3 sept 1922
LE SECRET PROFESSIONNEL,
édition de 1925 à laquelle on a joint Le Monologue de l'Oiseleur & douze dessins en couleurs de l'auteur reproduits en fac-similé.
Au Sans Pareil, 1925. In-4 broché, 105 pp. Edition de luxe, en partie originale, illustrée de douze dessins hors texte de l'auteur reproduits en fac-similé. Tirage limité à 530 exemplaires
"On a coutume de représenter la poésie comme une dame voilée, langoureuse, étendue sur un nuage. Cette dame a une voix musicale et ne dit que des mensonges.
Maintenant, connaissez-vous la surprise qui consiste à se trouver soudain en face de son propre nom comme s'il appartenait à un autre, à voir, pour ainsi dire, sa forme et à entendre le bruit de ses syllabes sans l'habitude aveugle et sourde que donne une longue intimité. (...)
Il arrive que le même phénomène se produise pour un objet, un animal. L'espace d'un éclair, nous voyons un chien, un fiacre, une maison pour la première fois. Tout ce qu'ils présentent de spécial, de fou, de ridicule, de beau nous accable. Immédiatement après, l'habitude frotte cette image puissante avec sa gomme. Nous caressons le chien, nous arrêtons le fiacre, nous habitons la maison. Nous ne les voyons plus.
Voilà le rôle de la poésie. Elle dévoile, dans toute la force du terme. Elle montre nues, sous une lumière qui secoue la torpeur, les choses surprenantes qui nous environnent et que nos sens enregistrent machinalement.
Inutile de chercher au loin des objets et des sentiments bizarres pour surprendre le dormeur éveillé. C'est là le système du mauvais poète et ce qui nous vaut l'exotisme.
Il s'agit de lui montrer ce sur quoi son coeur, son oeil glissent chaque jour sous un angle et avec une vitesse tels qu'il lui paraît le voir et s'en émouvoir pour la première fois.
Voici bien la seule création permise à la créature.
Car, s'il est vrai que la multitude des regards patine les statues, les lieux communs, chefs-d'oeuvre éternels, sont recouverts d'une épaisse patine qui les rend invisibles, et cache leur beauté.
Mettez un lieu commun en place, nettoyez-le, frottez-le, éclairez-le de telle sorte qu'il frappe avec sa jeunesse et avec la même fraîcheur, le même jet qu'il avait à sa source, vous ferez oeuvre de poète.
Tout le reste est littérature."
Je ne me compare à aucun des princes de la terre.
C'est l'unique fois où Cocteau se représente nu.
Il est difficile de s'entendre sur le sens de la réalité.
Que vous ai-je promis?
« À chacun de mes livres, j’ai la sensation de continuer un même dessin que des amis, penchés sur mon épaule, regardent sortir de ma plume sans comprendre sa signification. »
Donc, les ridicules d'écrire nous sautent aux yeux.
Si ce mouvement ralentissait, sans doute apparaîtrait-il.
Ils peuvent attendre.
Chaque fois que le poète en coupe une, son cœur bas.
Attention! A qui se trouve dans cette état, tout peut devenir miracle.
Le moindre joueur déplace plus de mystère qu'il n’apparaît.
Je retourne aux jeux qui me consolent.
Revenons à l'arrivisme...
...et qu'on ne leur demande aucun mysticisme en dehors des exercices religieux.
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