L’oeuvre de cet artiste américain, né en 1932, porte tout le poids de ses origines. Issu d’une modeste famille tchèque (comme Warhol) émigrée aux Etats Unis, Duane nait en tant que « le double ». Duane signifie le « double ». Quelle est sa véritable identité ? Qu’est-ce que le réel ? Qu’y a-t-il de l’autre côté du miroir ? Cependant , le « Duane » a bel est bien existé. Les riches employeurs de Madame Mihal (Michals)avaient un fils, disparu prématurément. La mère de Duane n’a trouvé rien de mieux que de l’affubler du prénom de l’enfant mort. Pauvre Vincent. Vincent II Michals est obsédé par la mort, la disparition, l’illusion, le temps qui s’écoule, le double, la superposition et les faux-semblants. Son Magritte fantomatique ne fait que passer , esquissant sur la toile la silhouette de son chapeau melon. L’empreinte de son corps est encore bien visible sur le coussin de la chaise, alors qu’un autre Magritte nous observe dans le miroir.
Après avoir réalisé plusieurs portraits d'inconnus lors d'un voyage en Russie à l'âge de 28 ans, armé d'un appareil photo emprunté, Duane Michals a sacrifié l'autonomie de l'image unique. En effet une seule photographie ne lui suffit pas à exprimer la complexité de ses pensées. Il impose la narration séquentielle dès 1966, créant sa réputation avec ses Sequences. Il accompagne ses tirages de texte, puis une histoire, et plus tard des poèmes ; pour lui il s'agit de la même trace qu'il peut laisser, ses annotations étant manuscrites. Ses photographies sont en noir et blanc afin de ne pas déconcentrer l'attention par des détails inutiles. Comme Roland Barthes le déclare dans la Chambre claire , le noir et blanc révèle la vérité originelle.Michals aborde alors différents thèmes dont les principaux sont souvent des oppositions binaires tel la vie et la mort, le corps et l'esprit, la jeunesse et l'âge mûr, le tout par le biais des séquences (environ 5 clichés), ou encore de jeux de surimpression.
Lorraine Karleskind
« La plupart des photographes sont des reporters, moi je suis un écrivain de la photographie. »
Il photographie Pasolini, Truffaut, Warhol, Duchamp, et surtout Magritte, toujours dans leur environnement naturel. « C'était surréaliste de manger à sa table avec sa femme en regardant un épisode de Bonanza, la série préférée de Magritte. »
Digne héritier des surréalistes, Duane Michals utilise lui-même à merveille la technique de la double exposition pour mêler deux images en une et exploiter son obsession du double. « C'est un vrai langage photographique, cela n'existe pas dans la vraie vie sauf quand l'ivresse monte. » La technique, pourtant, n'est pas son dada. « On n'a jamais entendu Hemingway parler de la marque de sa machine à écrire. » Avec un humour de showman qui revendique ouvertement son homosexualité, Duane Michals se fiche de saisir le moment présent, l'obsession de tout photographe. Il pense, lui, que formuler l'idée du maintenant c'est déjà concevoir le passé. En travaillant sur des suites d'images, il cherche au contraire à étirer le temps.
L'homme est d'une extrême sensibilité. Son père d'origine tchèque, ouvrier à Pittsburgh, avait promis une lettre spécialement écrite pour lui. A sa mort, Duane l'a cherchée en vain dans son appartement et a écrit sur une photo qu'il a prise de son père avec son frère : « Je ne sais toujours pas où il a caché son amour. » En 1974, il écrira sur du papier sensible sans image : « Je suis une réflexion photographiant d'autres réflexions à l'intérieur de réflexions. C'est une mélancolique vérité, mais je dois toujours échouer. » Pas, en tout cas, quand il se moque de l'art contemporain avec une férocité jubilatoire, comme dans son dernier travail, Foto Follies, How photography lost its virginity on the way to the bank. Il s'y travestit en « Sidney » Sherman, dessine un dollar avec ses pellicules en hommage à Jeff Koons, tire sur tout ce qui bouge et fait mouche à chaque fois. « Pourquoi une toile d'Andy Warhol coûterait plus d'argent que tout ce que je pourrais acquérir dans ma vie ? L'art est peut-être mort le jour où on a eu l'idée de le commercialiser. »
Serge Ricco
Télérama n° 3107
LE NU MASCULIN DANS L'ART . . . . Homosexualité masculine et culture art peinture dessin photographie cinéma littérature sculpture histoire et bien d'autres choses...
vendredi 4 décembre 2009
Duane Michals (1932 McKeesport, Pennsylvanie)
self-portrait as a devil on the occasion of my fortieth birthday
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Fabulous! Magnificent post!
RépondreSupprimer