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"La différence entre l'érotisme et la pornographie c'est la lumière". Bruce LaBruce
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mardi 9 août 2016



L'exploration du tableau



Les volets fermés







Les volets fermés montrent un globe transparent, bouillonnant de vie et de phénomènes aquatiques, minéraux et végétaux. La terre nouvellement créée semble contenue dans une sphère de verre. L'ensemble est sombre car nous sommes avant la création de la lumière.

Selon W. Fraenger, il s’agit du troisième jour de la Création, lorsqu’une « buée fertile » féconde le monde minéral et permet l’émergence des premiers végétaux, avant la conception des « luminaires » qui marquent « les époques, les jours et les années » : le Soleil, la Lune et les étoiles, créations du quatrième jour. La représentation de la Genèse est confirmée par les deux phrases inscrites en lettres gothiques dorées en haut de chaque panneau. Le volet gauche porte les inscriptions Ipse dixit et facta sunt, et le volet droit Ipse mandavit et creata sunt.





Volet gauche



Volet droit



Ces vers proviennent des psaumes d’Isaïe : « Lui parle, ceci est. Lui commande, ceci existe », ce qui renvoie à la Genèse : « Dieu dit : Que la lumière soit! Et la lumière fut » (Genèse 1-3).

Gen. I -« 1 In princípio creávit Deus cælum et terram. 2 Terra autem erat inánis et vácua, et ténebræ erant super fáciem abýssi : et spiritus Dei ferebátur super aquas. 3 Dixítque Deus : Fiat lux. Et facta est lux. 4 Et vidit Deus lucem quod esset bona : et divísit lucem a ténebris. 5 Appellavítque lucem Diem, et ténebras Noctem : factúmque est véspere et mane, dies unus. »

Gen. I - « 1. Au commencement Dieu créa le ciel et la terre. 2. Mais la terre était informe et nue, et des ténèbres étaient sur la face d’un abîme, et l’Esprit de Dieu était porté sur les eaux. 3. Or Dieu dit : Que la lumière soit. Et la lumière fut. 4. Et Dieu vit que la lumière était bonne, et il sépara la lumière des ténèbres. 5. Et il appela la lumière, Jour, et les ténèbres, Nuit : et d’un soir et d’un matin se fit un jour unique. »


Pour Ernst Gombrich, la peinture figurant sur les volets fermés a pour sujet la Terre, de laquelle se retirent les eaux du déluge. Le rayon de lumière est l'arc-en-ciel symbolisant la nouvelle alliance entre Dieu et les hommes, et la promesse que le Déluge n'aura plus lieu. Il est en outre établi que le centre de la représentation a été rogné et qu'il n'est pas impossible qu'on y vît initialement l'arche de Noé.






Au sommet, à gauche, un personnage âgé, assis dans une trouée de nuage, tient un livre : Dieu lui-même. Regardez le bien, ce personnage minuscule, car vous ne le reverrez plus. C'est déjà, avant même l'ouverture du triptyque le premier mystère. Alors que dans tous les autres tableaux de Bosch, Dieu est omniprésent et gigantesque, écrasant de sa présence les toiles, il est ici représenté uniquement par ce petit personnage, qu'on pourrait, faute d'attention, ne pas remarquer. Que veut nous dire Bosch ici?

Que Dieu est absent de la suite de l'œuvre? Et qu'elle va traiter d'un thème païen? Cette représentation du Père est en tout cas extrêmement atypique, voire unique dans l'œuvre du flamand. Autre étrangeté, il porte la tiare papale, même si cette représentation se fait à l'époque de Bosch, elle est pour l'artiste inédite. Un Dieu, créateur du monde affublé d'un élément terrestre et humain, porté par son simple représentant sur terre. Quel crime de lèse-majesté! Ouvrons les panneaux, nous voici maintenant au matin du quatrième jour.





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