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"La différence entre l'érotisme et la pornographie c'est la lumière". Bruce LaBruce
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samedi 16 octobre 2010

Qui a copié qui?



Pierre, un lecteur érudit de mon blog est venu me titiller avec un mail, et j'avoue que c'est tout l'intéret de ce blog. Il m'a fait poser question, et j'ai passé quelques heures de recherches pour élucider ce mystère.

En effet il m'a fait remarquer qu'un tableau posté dans l'article concernant Giulio Romano, Saint Jean-Baptiste dans le désert, ressemblait très étrangement à un tableau que je ne connaissais pas, du même nom, mais de Raphael.

Au début, j'ai cru que je m'étais laissé abuser par les nombreuses erreurs qui polluent le Net, et que le tableau que j'avais posté n'était pas de Romano mais de Raphael. Il faut dire, ma pinacothèque virtuelle ayant pris une extension telle, que j'avoue que parfois l'exactitude des références laisse à désirer.

J'ai donc repris ma souris de pélerin, à la recherche de ces références. Il existe bel et bien deux tableaux. Le premier effectivement de Raphael est une huile sur toile de 163 sur 147 cm qui se trouve à la galerie des offices à Florence (salle 35) et a été peint en 1518 (deux ans avant la mort de Raphael). Le deuxième pose un probléme. Il s'agit d'une huile sur bois de 178 sur 154 cm de date inconnue qui se trouve au Liechenstein Muséum à Vienne. Elle fait partie de la succession du prince Johann Adam I de Liechtenstein compilées en 1712, et a été attribuée à Giulio Romano en 1776.

Mais cette attribution pose problème, et les experts se posent encore la question de la véracité de cette attribution. Quand on voit les deux tableaux côte à côte, il est stupéfiant de constater que l'un est la photocopie quasi-conforme de l'autre.

Alors qui a copié qui?

Personnellement je pense que Romano a du copier son maître. Il a été en effet l'élève de Raphael dans son atelier de Rome. Il en a d'ailleurs hérité à la mort de Raphael en 1520. On dit même que ce que l'on considère comme le chef-d'oeuvre absolu de Raphael, La Transfiguration (1517-1520), n'a pas pu être achevé par le maître qui est mort d'un accès de malaria, et a donc été terminé par Romano (il en est probablement de même pour le couronnement de la vierge).

A cette époque, les maîtres de la renaissance avaient des ateliers, formaient de nombreux élèves, et esquissaient, commençaient, les tableaux et faisaient terminer telle ou telle partie par leurs élèves les plus méritant sous leur direction. C'était en quelque sorte un travail d'équipe. Mais, c'est le maître qui avait les idées, les élèves n'étaient que des exécutants.

Il est donc probable que le tableau soit, à l'origine, de Raphael, par la suite copié par Romano. A moins que Raphael ébloui par la création de son élève ait eu l'envie de copier trait pour trait le tableau de son élève. Mystère. A moins que les deux soient de Raphael.

Il est en tout cas étonnant, dans l'histoire de la peinture de trouver deux tableaux aussi semblables qui ne sont pas du même auteur. Voila, c'était mon interrogation du samedi. En tout cas, encore merci a Pierre de m'avoir fourni matière à masturbation intellectuelle. Je ne sais pas si ce post va intéresser quelqu'un, mais moi, je me suis bien amusé.





Raphael. St Jean baptiste dans le désert, 1518 -huile sur toile.(163x147cm) - Galerie des offices, Florence (cliquer pour la source)




Giulio Romano. St Jean Baptiste dans le désert, date inconnue - huile sur bois (178 x 154) Liechenstein Muséum à Vienne (cliquer pour la source)




La Transfiguration - Raphael (terminé par Romano) (1517-1520)Huile sur bois (405×218 cm) Musées du Vatican, Rome

1 commentaire:

  1. Bonjour. Bravo pour votre blog toujours érudit et excitant (au sens anglo-saxon du terme).
    Le fait de rencontrer 2 tableaux identiques d'artistes différents n'est pas si rare: les peintres ont toujours copié les oeuvres des maîtres, et il existe souvent d'un tableau célèbre plusieurs copies, dont on a parfois du mal à décider laquelle est le modèle.
    Par ailleurs, le titre de "chef-d'oeuvre absolu" de Raphaël, si ces mots ont un sens, est parfois attribué à la Madone de Dresde, avec ses angelots si souvent reproduits hors de leur contexte.
    Amitiés,
    Camille

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